Paris, capitale des technologies d’intérêt général 

mardi 11 février 2025

L’objet qui symbolise Paris aux yeux du monde est incontestablement la Tour Eiffel. Un objet construit par des ingénieurs et des ouvriers qui avaient en tête que la technologie n’est rien si elle n’est pas mise à disposition du plus grand nombre.

Alors que Paris accueille le sommet international sur l’Intelligence Artificielle, il est bon de rappeler que nos boulevards portent les noms de Pasteur, Raspail ou Arago, scientifiques de génie qui n’ont eu de cesse d’apporter au monde les technologies qu’ils développaient.

Tandis que l’Amérique se ferme, sabre les services publics, piétine ses engagements pour la planète et célèbre les techno-oligarques, ma conviction est que Paris peut saisir ce moment historique et devenir un refuge pour tous les entrepreneurs, les inventeurs, les ingénieurs, les scientifiques qui croient que les technologies sont des outils au service du plus grand nombre . Paris peut devenir la capitale mondiale des technologies d’intérêt général.

Paris peut devenir un terrain fertile pour déployer des IA qui résolvent des problèmes sociaux et environnementaux, loin de l’hypercapitalisme « truskien » (Trump-Musk). Paris compte autant de génies que San Francisco, mais nous ne les mettons pas au service des mêmes projets. La seule alternative européenne à ChatGPT a son siège social à Paris (Mistral AI) et la ville européenne qui forme le plus de talents européens en IA est de loin Paris. Nous avons toutes les ressources pour ne pas subir cette révolution technologique, mais au contraire pour la façonner avec nos valeurs.

L’IA, c’est un algorithme entraîné avec de grands jeux de données. La Ville de Paris possède des jeux de données uniques qui pourront permettre le développement de projets d’intérêt général. Concrètement, si les Parisiennes et les Parisiens me font confiance pour être leur prochain maire, la Ville de Paris animera la communauté des acteurs parisiens pour développer des IA de service public. Par exemple, et en priorité, nous avons besoin de l’IA pour identifier les Parisiens et les Parisiennes les plus fragiles qui s’autocensurent et renoncent trop souvent à leurs droits. Nous avons besoin d’une IA qui permettra d’alerter nos aînés avant une canicule, ou tout autre événement climatique extrême. Nous avons aussi besoin d’une IA pour lutter contre la fraude fiscale, notamment en analysant les transactions immobilières. Nous avons besoin de développer des usages de l’IA qui apportent une contribution concrète aux grands enjeux sociaux et environnementaux auxquels Paris va être confrontée, tout en inventant une régulation éthique, protectrice des atteintes à la vie privée, des biais discriminatoires de certains algorithmes et du droit d’auteur.

J’entends souvent que l’on oppose l’IA au travail. La Ville de Paris est un des premiers employeurs franciliens, et les trois quarts de ses agents exercent des missions de terrain, qui ne seront pas remplacées par l’intelligence artificielle. L’IA ne collectera pas les déchets, n’éduquera pas nos enfants et n’entretiendra pas nos rues et nos jardins. Mais elle pourrait alléger la charge de travail de certains métiers, notamment en automatisant des tâches administratives répétitives et frustrantes, pour améliorer le quotidien des agents de la Ville et leur permettre de se concentrer sur la dimension la plus importante de leur fonction : être au service du public. 

Les agents seront le moteur de l’adoption de l’IA par la Ville, mais les PME joueront le rôle d’accélérateur. Je vois tous les jours des usages développés par des jeunes entreprises innovantes, souvent issus des incubateurs de la Ville de Paris. J’aimerais lancer un Small Business Act municipal, en fléchant 20% de la commande publique vers les PME. Nous avons besoin de faire vivre ce tissu économique et nous avons besoin de nous imprégner des solutions les plus innovantes.

L’IA dépasse largement les frontières du périph et appartient aux enjeux qui nécessitent de voir Paris En Grand. L’essentiel de nos jeunes grandissent au nord de Paris , tandis que les institutions de recherche les plus prestigieuses sont sur le Plateau de Saclay et les sièges des entreprises dans Paris intramuros. Les gamins de Seine saint Denis seront les ingénieurs de Saclay de demain et les entrepreneurs du Silicon Sentier d’après-demain.

L’intelligence artificielle se conjugue au féminin, et pourtant… Comment ne pas ressentir du désarroi face à l’ultra-masculinité des équipes qui construisent les intelligences artificielles? La Ville de Paris devra lever les freins qui empêchent les jeunes filles d’adopter les carrières scientifiques. Symboliquement, je demanderai au Conseil de Paris de nommer la passerelle qui conduit vers l’Institut de France, du nom d’Alice Recoque, pionnière française de l’intelligence artificielle largement invisibilisée, dont l’exemple et le talent doivent guider les générations à venir. 

Paris vaut bien un Chief AI Officer. Car le rôle d’un élu, ce n’est pas de subir les vagues technologiques, c’est de les anticiper et de faire en sorte qu’elles soient mises au service du bien commun. Dans la Ville d’Eiffel, Raspail ou Pasteur, nous avons la chance historique de porter haut cet héritage. 

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